Causerie autour d’une Closerie : Roidemont

Les matinées de février sont frisquettes en Touraine, mais l’accueil que nous fait Monsieur DOMEC ce matin là à l’entrée de la propriété de Roidemont nous fait vite oublier cette fraîcheur. Avec sa verve habituelle, il nous a fait partager son respect et son amour de la nature, et nous a évoqué plus particulièrement l’histoire de la propriété de Roidemont.
Avant de l’écouter, plantons le décor. Comme dans les contes de fées, d’un coup de baguette magique nous gommons du paysage l’autoroute, l’avenue de Beaugaillard et la route nationale 76 et nous laissons le Cher reprendre le cours de son ancien lit. Le vallon de Vau Souby réapparaît alors dans la trouée de Beaugaillard et la plaine des Fontaines laisse présager le chemin qui deviendra la route de Vierzon et la rue de Grandmont. Pour mieux apprécier la scène, plaçons-nous sur le coteau de Montjoyeux à Bellevue exactement comme l’a fait le peintre Charles Antoine Rougeot lorsqu’il réalisa un tableau donnant une ” Vue du moulin et de la côte de Saint Avertin ” en 1791 (celui-ci est visible au musée des Beaux – Arts de Tours).

On y voit, pour ce qui nous intéresse aujourd’hui, dans l’angle droit et dissimulé dans le feuillage un logis assez étroit, précédé de deux tourelles : “Roy de Mont”. L’artiste a pris quelque liberté avec la réalité car d’après les historiens, la tourelle côté ” Est ” n’a jamais existée.

Le nom du lieu aussi a évolué comme on le voit sur les cartes à travers les siècles : Raide Mont, Roide Mont, puis enfin Roidemont. C’est ce panorama que l’on pouvait encore voir au début du XX ème siècle. Des photos et des cartes postales prises sous le même angle montrent un habitat clairsemé avec en particulier les demeures de Beaugaillard et des Fontaines (l’ancienne blanchisserie Péan et l’ancien restaurant). Les vieux Saint Avertinois se rappellent encore les chèvres de Madame Gabillaud ou de la Mère Frémondeau broutant dans ces endroits. Nous vous en reparlerons plus tard. Ce qui nous surprend au premier abord c’est le manque de végétation.

Mais où est donc la côte verte de Touraine ?

Elle n’est qu’au début de sa création. Montjoyeux et l’ensemble autour de Cangé et Sainte Hélène sont les seuls îlots boisés du coteau. Il faudra attendre la construction des maisons bourgeoises et le milieu du siècle dernier pour commencer à apprécier les différentes plantations arboricoles faites pour agrémenter et stabiliser le coteau.

Descendons de Montjoyeux en direction de Saint – Avertin : à notre gauche, la propriété La Roche sur Limançon qui deviendra par la suite la Roche le Roy du nom du seigneur de La Roche LEROY secrétaire particulier de Louis XI; devant nous un petit sentier serpente et monte vers un jardin clos, nous voici devant la closerie de « Roy de Mont ».

Selon M. DOMEC celle ci dépendait du seigneur de la Roche LEROY et la mitoyenneté des domaines vient du fait qu’un closier était chargé dans les grandes propriétés de s’occuper de l’entretien des vignes du seigneur et qu’il avait la jouissance d’une parcelle appelée clos.

Ce petit sentier existe encore sur quelques mètres. Il longe le mur d’enclos dans lequel une niche accueillait une statue de saint. Ceci n’est pas sans évoquer le chemin des Vierges du Carroy et des Gougets, emprunté par les nombreux pèlerins venus invoquer Saint Avertin pour les maux de tête et se rendant à l’Abbaye de Grandmont afin d’y faire leurs dévotions et leurs offrandes.

A l’angle de ce mur se trouve la tourelle ; dans la partie basse, nous voyons une porte de bois. Toc, toc, toc… M. DOMEC frappe à l’huis avant d’ouvrir à l’habitante des lieux : “Pâquerette” la chèvre des propriétaires. Elle bondit tel un cabri dehors pour nous souhaiter la bienvenue; elle nous accompagnera pour le reste de la visite.

Ah, quelle était jolie avec sa barbichette de sous – officier ! Mais là, c’est une autre histoire…